15.2.07

Encore de l'histoire

Jiu-Jitsu x Luta Livre : les combats qui les opposèrent

Il y a toujours eu des rivalités entre le jiu-jitsu et la Luta Livre qui, à une certaine époque, entraînèrent des bagarres générales citées en premières pages des journaux. Ces rixes eurent pour conséquences plusieurs Vale Tudo, organisés afin de calmer les esprits ou tout simplement de prouver sur les rings la supériorité de son art. Cette époque révolue, qui vit s’affronter deux factions jusque dans les rues même de Rio de Janeiro, fit connaître des combattants d’exception.

Tout commença en 1980 à Térésopolis, une petite ville située à 90 km de Rio, d’une bagarre entre Charles Gracie et un certain Mario Dumo, qui était le beau-frère de Flavio Molina (professeur de Taekwondo et de boxe thaïlandaise). Les problèmes continuèrent à Rio et Charles alla se plaindre à Rolls Gracie afin que soit réglé le problème. Rolls organisa une descente à l’Académie de Flavio Molina pour que soit organisée une confrontation entre Charles et le jeune homme en question. Mais rien de tout cela n’arriva, puisqu’une bagarre générale éclata dans l’Académie, qui ne prit fin qu’avec l’arrivée de la police. Le problème initial avait eu lieu entre des combattants de la boxe thaï et du jiu-jitsu, mais les combattants de la luta livre très proches de ceux de la thaï (beaucoup d’entre eux pratiquaient les deux disciplines, comme Marco Ruas, Luiz Alves…) se retrouvèrent au milieu de l’affrontement.

À partir de ce moment-là, les affrontements ne firent que s’accroître entre les pratiquants des deux disciplines. Les Gracie et les pratiquants du jiu-jitsu en général avaient l’habitude de défier les autres disciplines, mais c’était la première fois que l’une d’entre elles leur résistait vraiment. Flavio Molina se mit à l’entraînement au sol et alla défier Rickson, qui était déjà un des chefs de file du jiu-jitsu, de l’affronter. Rickson lui répondit qu’ils allaient organiser un Vale Tudo, mais qu’il lui faudrait affronter son meilleur élève, et qu’en cas de victoire il pourrait alors l’affronter. Cet élève était Marcelo Behring, à l’époque ceinture marron. Du côté de la Luta Livre, deux jeunes combattants furent retenus afin de défendre l’honneur auprès de Flavio. Eugénio Tadeu et Marco Ruas. Leur étaient opposés côté jiu-jitsu Marcelo Behring, Renan Pitangui et Fernando Pinduka. La rencontre eut lieu an 1983 au Maracanazinho et marqua la première grande défaite du jiu-jitsu, persuadé de remporter une écrasante victoire. Flavio Molina, mal entraîné, mal préparé, dut abandonner devant Marcelo Behring, nettement supérieur. Par contre Eugenio Tadeu, alors complètement inconnu, massacra le jeune espoir du jiu-jitsu Renan Pitangui, qui sortit du ring avec des œufs de poule un peu partout sur la tête. Le dernier combat de la soirée opposa le meilleur élève de Carlson Gracie, Pinduka, qui était connu pour être un grand frappeur et aimer les luttes violentes, à un autre inconnu, un certain Marco Ruas. Le combat alla jusqu'à son terme et fut déclaré match nul.

Mais les problèmes ne s’arrêtèrent pas là pour autant, les bagarres de rue et les descentes entre les deux disciplines ne firent que s’accentuer et absolument tout le monde y prit part. Rickson Gracie et Hugo Duarte, les chefs de file respectifs des deux disciplines, s’affrontèrent par deux fois, sur la plage et dans un parking. Des luttes violentes et sans règles au cours desquelles Rickson l’emporta par deux fois.

C’est au tennis club de Grajau, en 1991, qu’eut lieu la deuxième grande confrontation, et cette fois-ci c’est le jiu-jitsu qui remporta une écrasante victoire sur la luta livre. C’est Wallid Ismail qui fut à l’origine de cette rencontre. Par l’intermédiaire de la presse, il défia la luta livre et affirma que le jiu-jitsu était la meilleure des toutes les disciplines et qu’elle ne pourrait être vaincue. Peu de temps après, lors d’un Championnat de jiu-jitsu, les gars de la luta livre vinrent relever le défi contre Wallid et n’importe quel autre combattant prêt à les affronter.

Murilo Bustamente, Marcelo Behring et Carlson Gracie se réunirent avec Marco Ruas, Dénilson, Hugo Duarte et Eugénio Tadeu, et décidèrent d’organiser les combats à l’intérieur même de l’Académie, avec cinq combattants de chaque côté. Du côté du jiu-jitsu, Wallid, Amaury Bitteti, Fabio Gurgel, Marcelo Behring, Murilo Bustamente. En fin de compte, Amaury attrapa une Hépatite, Marcelo se blessa au coude et Ruas retira sa participation… Il ne restait côté jiu-jitsu que Murilo, Fabio et Wallid. Ils s’entraînèrent ensemble pendant quatre mois sous l’égide de Carlson, aidés de Liborio, Zé Mario et les autres. Ce fut la seule et unique fois que toutes les factions du jiu-jitsu s’unirent. Ce fut le contraire auprès des gens de la luta livre qui démontrèrent un manque d’intérêt certain pour cet événement. Le seul qui s’était entraîné sérieusement était Hugo Duarte, mais au dernier moment on ne lui trouva pas d’adversaire côté jiu-jitsu. Finalement l’événement fut organisé par Robson Gracie (qui n’est autre que le fils de Carlos Gracie et le père de Ryan et Renzo. ; il est également le président de la fédération de jiu-jitsu de l’état de Rio de Janeiro).

Bien que les combats se disputèrent à Grajau, dans la Zone Nord, le fief même de la luta livre et de la boxe thaï, leur présence fut quasi inexistante tant au niveau numérique qu’auditive. La salle était occupée à 95% par des combattants du jiu-jitsu qui envahirent les bords du ring et frappaient les combattants de la luta livre à leur sortie. Même l’arbitre portait le t-shirt de la fédération de jiu-jitsu. Lors de ces combats il n’y avait aucune règle et tout était permis. Ils furent considérés pendant longtemps comme les plus violents de l’histoire du Vale Tudo. Eugénio Tadeu était jusqu'alors invaincu et Wallid était déjà connu pour ses bagarres.

Arrivée des deux combattants... Célèbre regard de tueur de Wallid... Dès le début du combat, ce fut plutôt bien partit pour Eugénio, qui prend l’avantage, tente une guillotine suivie d’une Kimura, les deux bien défendues par Wallid, qui passe à l’attaque avec une série de coups de tête et de coudes de l’intérieur de la garde, défendus par Eugénio. Les deux hommes se retrouvent au corps à corps debout et sont passablement épuisés. Nouvelle amenée au sol de Wallid, et nouvelle série de coups de tête qui fatigue le représentant de la Luta Livre. Retour en pieds qui donne l’avantage à Eugénio, mais Wallid le ramène au sol pour lui asséner une nouvelle série de coups de tête. Fin du premier round et l’on doit séparer les deux combattants.

À l’appel du deuxième round les deux combattants se jettent l’un sur l’autre, comme si le combat venait juste de commencer. Eugénio sort ses jambes et prend l’avantage en pieds poings avec des frappes plus précises, mais encore une amenée au sol de Wallid qui garde la même technique et place des coups de tête. À partir de ce moment là, le combat garda le même schéma : Eugénio prenait l’avantage en pieds et Wallid l’amenait au sol pour lui placer des coups de tête. Jusqu'à une sortie de ring des deux combattants, qui continuèrent le combat arrivés au sol et malgré l’intervention de la sécurité. Eugénio reçu de nombreux coups de pieds de la part des supporters du jiu-jitsu présents au bord du ring. Il fut dans l’impossibilité de remonter sur le ring, fut compté et le Jiu-jitsu déclaré vainqueur.

Cette victoire marquât le début de la carrière de Wallid et fut le principal combat de la soirée qui en comptait deux autres. Ils virent la victoire de Murilo Bustamente et de Flavio Gurgel face à Marcelo Mendes et O Denilson qui, mal préparés, n’étaient pas à la hauteur du combat. Cette fois-ci les données avaient été inversées. Trop confiants, les combattants de la luta livre se firent écraser par ceux du jiu-jitsu, alors complètement inconnus. L’intégralité des combats fut retransmise en direct à la télévision nationale et le jiu-jitsu vécut une véritable explosion ; à tel point que toutes les Académies furent envahies.

Mais les nouveaux qui commencèrent à s’entraîner à cette époque donnèrent bien du fil à retordre ; ils provoquèrent beaucoup de bagarres de rue, firent parler d’eux dans la presse, ce qui engendra la mauvaise réputation du jiu-jitsu qui perdure jusqu'à aujourd’hui au Brésil. Mais ceci est une autre histoire...

Un autre combat marquant fut celui qui opposa Eugénio Tadeu (toujours lui) à Renzo Gracie. Le combat avait encore été organisé par son père, Robson Gracie. Eugénio avait tiré les leçons de son match contre Wallid. Il ne commit pas les mêmes erreurs et cette fois-ci utilisa à bon escient ses techniques pieds poings. Renzo fit un excellent début de combat, amena par plusieurs fois Eugenio au sol, passa dans son dos, mais très rapidement il commença à fatiguer. Eugénio prenait de façon flagrante l’ascendant sur Renzo qui devenait en danger et risquait à tout moment un dangereux KO au son des cris des supporters de la luta livre. Quand soudain toutes les lumières s’éteignirent dans la salle ! Au milieu du désordre, une immense bagarre générale éclata dans la salle, et des coups de feu furent même échangés. Le combat fut interrompu et la salle évacuée. Beaucoup affirmèrent par la suite que ce ne fut pas un accident et que Robson lui-même fit éteindre la lumière car un Gracie ne pouvait pas perdre face à un représentant de la Luta Livre...

Mais l’événement où les deux disciplines s’affrontèrent le plus grand nombres de fois fut L’IVC, "L’International Vale Tudo Championship". Considéré par beaucoup comme l’un des seuls véritables Vale Tudo, sans gants, avec des règles plus que libres. Par exemple, si l’un des combattants fait tomber son protège dents, le combat n’est pas interrompu afin qu’il puisse le remettre. À ce jeu-là, le jiu-jitsu remporta de nombreuses victoires ! Mais la grande gagnante fut la luta livre, qui détient le record de victoires de la compétition.

De nos jours, jiu-jitsu et luta livre continuent de s’affronter, mais uniquement sur les rings et les tatamis et de façon très fair play. De nombreuses compétitions mélangeant les deux disciplines sont maintenant organisées, que se soit sous les règles du submission grappling ou du combat libre. Si le jiu-jitsu possédait un avantage technique, les choses commencent à s’équilibrer, voire même à s’inverser avec la nouvelle génération.

À Suivre…

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