Trenton, New Jersey. Onze heures du matin. Une foule de badauds hétéroclite s'amasse gentiment devant les portes de la Sovereign Bank Arena : hommes, femmes, fighters aux oreilles abimées, mais aussi un père et une mère de famille et leurs enfants, des jeunes, des moins jeunes... Ici, pas d'a priori ni de préjugés : le grappling intéresse tout le monde. Premier choc culturel...
Dans son coin, un peu à l'écart, Nicolas Renier se concentre, le casque de son iPod sur les oreilles. Il sait qu'il va devoir batailler dur, ne pas se relâcher et être constamment vigilant durant la compétition. La veille, il a appris le nom de son adversaire du premier tour : Tetsu Suzuki, un habitué du Shooto. Il pense aussi à Flavio, son mentor, qui l'a toujours accompagné dans les compétitions importantes mais qui, cette fois, a été obligé de rester en France et ne pourra pas être à ses côtés.
Mais Nicolas n'est pas venu seul. Plusieurs membres de la FSTeam, ainsi que Laurence Cousin, qui doit combattre elle aussi, ont fait le déplacement avec lui. Parce qu'il a besoin d'être soutenu plus que jamais. Et parce que ce qu'il va vivre, c'est quelque chose d'exceptionnel.
Il faut dire que ce qui l'attend derrière cette façade géante aux allures de saloon, ce n'est rien de moins que l'un des plus grands tournois de grappling au monde (si ce n'est le plus grand) : l'ADCC.
A l'intérieur, une salle de près de 10 000 places avec quatre aires de combat et quatre écrans géants centraux, pour permettre aux spectateurs les plus éloignés de suivre les combats en direct. Les gradins se remplissent peu à peu, principalement les rangées centrales. Le reste de la salle restera quasiment vide durant toute la compétition (sans doute à cause du prix des billets, plutôt rédhibitoire).
Le tournoi débute par la catégorie des plus de 99 kgs. Les favoris : Fabricio Werdum, Rolles Gracie et Pe De Pano. Dans les tribunes, les membres de la "french team" observent les combats avec attention, pour ne rien rater du spectacle qui s'offre à eux.
Viennent ensuite les moins de 99 kgs (Xande Ribeiro, Robert Drysdale...), puis les moins de 88 (Damian Maia, Romulo Barral...) et ainsi de suite jusqu'à la catégorie de Nicolas, celle des moins de 66 kgs.
La tension monte. En coulisse, un officiel de l'ADCC appelle les combattants de ce premier tour un par un. Rani Yahira, Leo Vieira, Baret Yoshida, Jeff Glover, Tetsu Suzuki, Nicolas Renier...
Cette fois, ça y est. C'est maintenant que tout se joue.
Nicolas est annoncé sur le tapis 4. Accompagné de Dao, il traverse toute la salle (le tapis 4 est à l'opposé de l'entrée des combattants, tout au bout de la salle) et se présente sur l'aire de combat. L'équipe venue le soutenir se déplace dans les gradins et vient s'asseoir juste en face du tapis. Julien, l'un des membres de la FS Team qui l'accompagnent, prend l'initiative d'appeler Flavio au téléphone, pour lui faire vivre le combat en direct.
Tetsu Suzuki, l'adversaire de Nicolas, débarque quant à lui dans une tenue argentée d'extraterrestre, agitant un éventail aux couleurs du Japon. Sans doute sa façon à lui d'intimider son adversaire.
Le combat débute.
Nicolas nous le raconte : "Début du combat, je le projette avec le arm drag assez facilement."
"Arrivés au sol, il tente tout de suite une clé de cheville alors que j'essaie de passer la garde. Je me dis donc que ça ne sert à rien de prendre des risques alors qu'il n'y a pas encore les points (un combat à l'ADCC dure 10 minutes : les 5 premières sans points, et les 5 dernières avec, NDLR). Je me relève donc. Debout je ne l'ai pas senti fort. Donc je "fuis" un peu le combat."
"Il essaie de me faire des trucs de Judo qui ne servent à rien. Et moi, comme un mongole, je me dis que la prochaine fois qu'il me tourne le dos, je tente un truc... Je ne savais pas quoi mais je me suis dit ça... Résultat : il me refait son truc de Judo et je tente de le contrer avec un autre truc de Judo (ce qui n'est pas ma spécialité) !"
"Bref, on se retrouve au sol avec lui au dessus."
"Je me mets à quatre pattes et il passe dans mon dos avec un seul crochet, et là il reste comme ça jusqu'aux points. Et au moment des points, il met les crochets plusieurs fois : il y a donc 9/0."
"Je sors du dos à 2 minutes de la fin du combat. Il tente direct une clé de cheville, que je défends, et il en retente une autre... et je tape."
La défaite est amère.
D'autant que Nicolas sait qu'il n'a pas combattu comme il a l'habitude de le faire : "Je ne suis jamais rentré dans le combat. Je ne me suis pas senti à l'aise. J'ai combattu en croyant que je pourrais toujours m'en sortir. Je suis vraiment dégoûté d'avoir combattu aussi mal. Le niveau n'est pas extraordinaire mais ils ont plus l'habitude des compétitions que nous. Désolé pour tous ceux qui ont cru en nous."
Qu'à cela ne tienne. Nicolas n'est pas abattu pour autant. Et puis la compétition n'est pas tout à fait finie, puisqu'il doit encore coacher Laurence Cousin pour son combat face à Laura D'Auguste.
Malheureusement pour Laurence, elle non plus ne parviendra jamais vraiment à rentrer dans son combat, face à une adversaire puissante qui bloque dès qu'elle a mis ses points.
Elle s'inclinera sur un score de 2-0 (un renversement), terriblement déçue de n'avoir pas pu pleinement s'exprimer dans ce tournoi qui ne lui a pas vraiment facilité la tâche (pour une explication des problèmes rencontrés par Laurence durant cet ADCC, voir le sujet qui lui est consacré sur Ikusa.fr).
Nicolas, lui, pense déjà à la suite. Il sait maintenant ce qu'il doit entreprendre pour rivaliser au plus haut niveau avec les plus grands grapplers du monde. Il nous confie son souhait de multiplier les expériences internationales, en allant désormais combattre aux Etats-Unis, dans de grands tournois tels que le Grapplers Quest ou le Naga.
Parce qu'il n'y a qu'en rencontrant les meilleurs que l'on peut prétendre un jour les égaler. Et parce qu'il n'y a qu'en devenant meilleur qu'un jour Nicolas refoulera le tapis de l'ADCC et qu'il en repartira victorieux.
Pour d'autres photos de l'événement, rendez-vous sur O Lutador Ilustrado.
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